NOVEMBRE 2019
SUR LES TRACES DE LA NUEVE
Du 14 au 16 novembre 2019, une délégation de notre association s’est rendue à Paris pour un pèlerinage qui nous a conduit sur les traces de la colonne Dronne avant de nous rendre au Père Lachaise pour un recueillement sur les monuments et tombes liés aux républicains espagnols. Notre petit périple s’est conclu par une cérémonie commémorative avec un dépôt de gerbe au pied de la tombe du Soldat Inconnu et une visite de la Capitale.
Jeudi 14
C’est accompagnés de Véronique Salou, présidente de l’association « 24 août 1944 » que notre petite escapade parisienne a commencé par un circuit suivant l’essentiel du parcours réalisé par la Nueve ; de la porte d’Italie jusqu’à l’Hôtel de Ville.
La 9e Compagnie de la 2e DB est nommée ainsi car à sa constitution sur les 160 hommes qui la composent 146 sont des Républicains Espagnols. Elle a à sa tête un officier français, le Capitaine Dronne. Il dira de ses hommes (carnets de routes d’un croisé de la France Libre Edition France-empire 1984 P ; 251) que dans leur grande majorité « ils n’avaient pas l’esprit militaire. Quelques-uns étaient même antimilitaristes. Mais ils étaient de magnifiques soldats, des guerriers courageux et expérimentés ». Son dernier représentant, Rafael Gomez Nieto, s’est éteint le 30 mars 2020 à l’âge de 99 ans.
C’est donc un exploit héroïque que va réaliser la Nueve, qui au moment de son entrée dans Paris est encore composée de 130 combattants espagnols.
La 2e DB du Général Leclerc a des difficultés à rentrer dans la Capitale, face à une défense allemande efficace et bien organisée.
Elle devrait déjà être entrée dans Paris. Leclerc s’impatiente. Il donne alors l’ordre à Dronne et à la Nueve de foncer sur Paris.
Extrait de l’ouvrage « La France Libre » de l’historien Jean Louis CREMEUX BRILHAC.
« La 2e DB a reçus son lot de républicains espagnols, regroupés pour la plupart sous les ordre du capitaine Dronne dans la 9e compagnie de marche du Tchad qu’on appelle la « Nueve » par ce que la langue usuelle est l’espagnol.
Le Général de Gaulle tient absolument que ce soit l’armée de Leclerc qui libère Paris et non pas l’armée alliée. Après bien des tractations surtout d’ordre tactique, le commandant en chef des forces alliées, le Général Eisenhower, donne le feu vert pour lancer la division Leclerc sur Paris. La 2e DB s’ébranle le 23 août au matin d’Argentan. Le soir Leclerc est à Rambouillet. Il y signe son ordre d’opérations pour le lendemain :
- S’emparer de Paris
- Tenir Paris.
Le lendemain, 24 août, les unités de la 2e DB progressent partout, mais elles se heurtent à de fortes résistances. A la nuit, elles ne sont qu’aux portes de la Capitale. Les américains s’inquiètent et Leclerc s’impatiente. A 19h30 au carrefour central d’Antony, il tombe sur un des officiers, un FFL de 1940, la capitaine Dronne, administrateur colonial qui a fait toutes les campagnes du Fezzan et à qui il a confié une unité héroïque et rebelle, la 9ème compagnie qu’on appelle « la Nueve » parce qu’elle comprend cent trente républicains espagnols. Dronne qui vient de nettoyer la localité d’Antony, a manœuvré habilement toute la journée ; il est sûr qu’en évitant les grandes routes, on trouverait un accès vers Paris. Leclerc le prend au mot : ‘’Dronne, filez sur Paris, entrez dans Paris !’’
La Nueve avec ses jeeps, ses chars, ses half-tracks, ses 130 hommes, guidée par un habitant d’Antony, se faufile jusqu’à Paris ; puis par un itinéraire contourné, elle atteint l’Hôtel de Ville où elle hisse le drapeau français. A la grande horloge, il est 21h22. Dronne dispose ses véhicules en demi-cercle pour protéger le bâtiment. Par radio il rend compte : ‘’Mission accomplie’’. Autour de lui la Marseillaise retentie. »
1 Porte d’Italie. 162, Avenue d’Italie. 75013. Point d’entrée dans la Capitale.
2 Collège 55, rue de Baudricourt 75013. La Nueve abandonne l’Avenue d’Italie et initie un zig-zag pour éviter les allemand
3 Place Nationale, 75013. La Nueve tourne vers la rue Nationale pour esquiver une menace nazie.
4 Rue Nationale. 123o-131 bis, rue Nationale, 75013.
5 Place Pinel, 75013. La Nueve évite un poste allemand.
6 20, rue Esquirol, 75013. Dernier passage à travers les rues étroites de ce quartier. La Seine est proche
7 68, Boulevard de l’hôpital, 75013. Descente vers la Seine.
8 Pont d’Austerlitz, 75012. La Nueve l’empreinte pour atteindre le centre de Paris.
9 Quai Henri IV, 75004.
10 Quai de l’Hôtel de Ville, 75004.
11 Place de l’Hôtel de Ville, Arrivée à la Mairie de Paris.
C’est ainsique tous les half-tracks entrés dans Paris cette nuit-là, portaient les noms d’inoubliables batailles de la guerre d’Espagne : Belchite, Teruel, Ebro, Madrid, Guadalajara, Guernica, Brunete, Santander… et étaient constitués d’équipages de républicains espagnols.
Fresque commémorative
Dans le prolongement de ce périple, notre petite délégation s’est rendue au 17 rue Esquirol dans le 13 arrondissement de Paris pour y découvrir la fresque érigée par l’artiste Juan-Chica-Ventura à la mémoire de la Nueve.
Vendredi 15
Visite du père Lachaise
C’est sous une pluie battante et en compagnie d’Annick ANDRE, membre de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation et qui pour la circonstance officiera comme guide, que notre petite troupe hispano-savoyarde se rendra sur les tombes et monuments commémorant les acteurs et martyrs des deux conflits espagnol et mondial.
Photographe de guerre et compagne de Robert CAPA, de son vrai nom Gerta Pohorylle, Gerda Taro couvrira la guerre d’Espagne au côté de CAPA pour le journal communiste Ce soir. C’est durant les terribles combats de Brunete qu’elle sera mortellement blessée par un char.
Elle sera enterrée au Père Lachaise, le 1er août 1937 , en présence de milliers de personnes. Son éloge funèbre sera prononcé par Pablo Neruda et Louis Aragon. Sa tombe sera profanée par les nazis en 1942.
Le Matricule 5185 du camp de concentration de Mauthausen qui porte le triangle bleu des « apatrides » marqué d’un S rouge (pour Spanich) est un jeune Catalan de 20 ans. Fait prisonnier durant la bataille de France en juin 40, il sera d’abord transféré avec d’autres combattants français et espagnols à Mulhouse. Il sera ensuite déporté le 27 janvier au camp de Mauthausen où les deux tiers des 7200 républicains espagnols déportés vers ce camp y laisseront leur vie. Photographe de métier il sera affecté au service d’identification du camp. Alors que l’ordre est donné par les nazis, à la fin de la guerre, de détruire le fonds photographique du camp, il parviendra à sauver un tiers des clichés qui serviront de preuves à charge contre les criminels nazis lors du procès de Nuremberg.
Francisco Boix Campo mourra le 7 juillet 1951 des conséquences de la déportation.
Monuments commémoratifs de la déportation et du sacrifice des espagnols pour la liberté.
Ravivage de la flamme du soldat inconnu
Notre escapade commémorative parisienne s’est conclu par une cérémonie sur la tombe du soldat inconnu. A cette occasion nous avons pu participé au ravivage de la flamme et un dépôt de gerbe sous les couleurs de la Bandera Republicana. Une cérémonie émouvante en présence des autorités militaires et des élèves musiciens du Lycée Georges Brassens.